

Colette Camelin, professeur émérite de littérature française Formes et Représentations en Linguistique et Littératture (FoReLL) Date : 05/07/2018 Lieu : CCIC Cerisy Durée : 1:05:33 | ![]() |
Cette communication a été prononcée dans le cadre du colloque intitulé "Segalen 1919-2019 : "Attentif à ce qui n'a pas été dit" qui s’est tenu au Centre Culturel International de Cerisy du 4 au 11 juillet 2018, sous la direction de Colette CAMELIN, Muriel DÉTRIE, Mathilde POIZAT-AMAR et Philippe POSTEL.
Actes du colloque
Victor Segalen. « Attentif à ce qui n'a pas été dit »
Colette Camelin (dir.), avec la collaboration de Muriel Détrie
Hermann Éditeurs — 2019
ISBN : 979-1-0370-0134-4
Présentation du colloque
Disparu prématurément, Victor Segalen (1878-1919), médecin, voyageur, sinologue, archéologue, éditeur, poète, a laissé une œuvre abondante, en grande partie inédite à sa mort, publiée et commentée seulement à partir des années soixante. Fondée sur une riche expérience humaine, située au carrefour de plusieurs cultures et de plusieurs disciplines, novatrice en matière de formes et d'idées, elle n'a cessé depuis lors de susciter de l'intérêt dans le monde entier, notamment en Chine.
Présentation de l'intervenante
Colette Camelin, professeur émérite de littérature française à l’Université de Poitiers; a enseigné les humanités à Sciencespo Euroamerican College (Reims) de 2012 à 2017. Elle est actuellement présidente de l’Association Victor Segalen.
Résumé de la communication
Segalen a vécu la guerre à l’hôpital militaire de Brest, sur le front des Flandres et en Chine. Son expérience des horreurs de la guerre industrielle l’amènera à préciser ses positions face à ce qu’il appelle la "tuerie" sur le front et à envisager d’écrire "le sottisier de la guerre". "En temps de détresse", selon l’expression de Hölderlin, il s'insurge et se bat contre "les forces décomposantes"; il veut "mener une œuvre qui ne soit pas de destruction", et il le fait avec constance dans les circonstances les plus défavorables: pendant la guerre, il travaille à Équipée, Peintures, Orphée-Roi, "Hommage à Gauguin", René Leys, Chine. La Grande Statuaire, Combat pour le sol, Thibet... Il lance des projets (Essai sur soi-même, Sites...), écrit des pages essentielles intégrées à l’Essai sur l’exotisme qu’il intitule Imago Mundi, c’est-à-dire sa "vision du monde à [lui]: artiste". Or, la seule "raison d’être" de l’artiste est "d’exprimer ce qui n’a pas été dit" — poursuivre son œuvre à l’abri du "rempart" des manuscrits. Comment ces textes tiennent-ils "la Grande Chose" à distance ? "Le fait de la guerre", cependant, attaque le rempart par plusieurs angles. Segalen tente alors de penser ce "fait" dans le cadre du "Divers" et de retrouver le chemin ascendant vers le seul royaume auquel il aspire : "le Mystérieux". Mais quand la guerre se termine, le poète a de plus en plus de mal à "recoudre" le livre de sa vie et de son œuvre "violemment déchiré à la reliure". Cette déchirure a certes une dimension existentielle, mais elle concerne d’abord son œuvre et sa pensée d’artiste.